S’occuper des finances d’une personne en cas d’inaptitude

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Une personne peut devenir incapable de prendre des décisions pour elle-même à la suite d’une maladie ou d’un accident. Mais on ne peut déclarer une personne inapte du jour au lendemain, il y a une procédure à suivre.

 

 

 

 

 

Comme bien des hommes de sa génération, le père d’Isabelle Brodeur s’occupait des finances de son ménage. Tout était à son nom. Aujourd’hui atteint de la maladie d’Alzheimer, il n’est plus en mesure de le faire. Sa femme et sa fille doivent prendre le relais.

« Il ne se souvient plus de ce qu’il a fait la veille, raconte Mme Brodeur. Il ne peut plus s’occuper de ses affaires. Ma mère a une procuration pour les choses du quotidien comme le loyer. Elle a toutefois les mains liées pour le reste. » Même après 51 ans de mariage, elle ne peut vendre la voiture au nom de son mari, par exemple.

Mme Brodeur a donc entrepris les démarches pour que l’inaptitude de son père soit reconnue. Elle doit obtenir un certificat d’un médecin et un certificat psychosocial d’un professionnel (ex. : travailleur social) attestant de la condition de son père.

Ses démarches sont compliquées par le fait qu’elle habite à plusieurs heures de route de ses parents. Ce n’est pas nécessairement évident pour la mère de famille de se libérer pour rencontrer les intervenants. Mais c’est parfois incontournable.

« La reconnaissance de l’inaptitude doit ensuite se faire par le jugement d’un tribunal, indique Nathalie Gilbert, conseillère en communication au Curateur public du Québec. Un des proches doit déposer la demande au palais de justice dans le district judiciaire où réside la personne. » Ces démarches sont les mêmes que la personne ait un mandat de protection (anciennement appelé mandat d’inaptitude) ou non.

Avec ou sans mandat de protection?

La suite est cependant différente.

Avec un mandat de protection en cas d’inaptitude : les volontés exprimées dans le document s’appliquent. « Les démarches pour l’homologation du mandat peuvent être faites par le mandataire, indique Johanne Pilote, notaire. Par contre, les gens demandent l’aide d’un notaire ou d’un avocat en général. » Ensuite, aucune autre démarche n’est nécessaire.

Sans mandat de protection en cas d’inaptitude : il faut réunir une assemblée de parents, d’alliés ou d’amis. Celle-ci nommera un curateur et formera un conseil de tutelle de trois personnes. « On m’a demandé d’inviter sept personnes à l’assemblée, souligne Mme Brodeur. Le problème, c’est que mon père, ma mère et moi sommes tous enfants uniques. Ça ne fait pas beaucoup de monde à inviter, même si j’ajoute mon mari. Je ne peux pas demander à mes enfants parce qu’ils sont mineurs. »

Le Code civil du Québec prévoit qu’il faut un minimum de cinq personnes pour tenir l’assemblée. « Il s’agit de convoquer des parents, des alliés ou des amis de la personne, explique Mme Gilbert. Autrement dit, des gens qui démontrent un intérêt particulier pour elle. » Il ne s’agit donc pas nécessairement de membres de la famille.

« S’il est impossible de convoquer cinq personnes et que des efforts raisonnables ont été faits en ce sens, l’initiative des procédures peut être transférée au Curateur public, précise Mme Gilbert. Il a le pouvoir de demander la dispense de convocation de cette assemblée. » La personne qui demande l’ouverture du régime de protection (ou son conseiller juridique) peut s’adresser au Curateur public. Celui-ci demandera au tribunal de procéder à l’ouverture du régime sans que cette assemblée soit tenue.

Quant au conseil de tutelle, cette responsabilité peut revenir à une seule personne s’il est impossible d’en trouver trois. Le Curateur public pourrait aussi assumer ce rôle.

La personne choisie comme curateur doit veiller aux affaires et aux soins de la personne inapte. Elle doit également remettre un rapport chaque année au Curateur public. « Il exerce une surveillance de l’administration faite par les proches et cela lui permet d’intervenir s’il y a trace d’abus, explique Mme Gilbert. C’est dans un but de protection de la personne inapte. »

Faire autrement

Si un proche devient inapte, il n’est pas toujours nécessaire d’entreprendre cette procédure. « Si la personne est bien entourée, qu’il n’y a pas de risque d’abus et qu’elle a peu de biens à gérer, on peut utiliser d’autres moyens très simples pour s’occuper de ses affaires, note Mme Gilbert. Par exemple, certains contrats de mariage peuvent permettre à l’un des époux d’agir au nom de l’autre. Des organismes gouvernementaux peuvent aussi désigner un proche pour administrer les prestations versées à la personne inapte, comme le chèque de pension. »

Par ailleurs, lorsqu’aucun proche ne souhaite s’occuper de la personne inapte, c’est le Curateur public qui prend le relais. « On favorise toujours que ce soit les proches qui s’occupent de la personne inapte », précise cependant Mme Gilbert.

Version adaptée d’un article publié précédemment dans La Presse.

Nathalie Côté
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